« La consigne, c’est le circuit court de l’emballage », Laurent Halmes, Fondateur de Bring Back

Bring Back, basé à Liège, est un prestataire de service d’emballages alimentaires en verre réutilisables (bocaux et bouteilles). Lorsque les vidanges sont retournées, la société les lave, les contrôle et les livre à ses clients comme neufs sur palettes, avec des casiers adaptés.

Bouteilles vides propres

 

Quel est l’intérêt économique de vendre ses produits dans des emballages consignés ?

Tout d’abord, le prix ! L’utilisation d’emballages consignés revient moins cher que l’utilisation d’emballages jetables. Et comme corollaire, la prévisibilité des coûts, car la consigne permet de se prémunir contre l’inflation du prix du verre neuf, très volatil, voire qui explose en ce moment en raison de la flambée des prix de l’énergie. Ensuite, la disponibilité : la Belgique est extrêmement dépendante de l'étranger pour sa consommation de verre. Je signale au passage que la Russie et l’Ukraine sont parmi les principaux fournisseurs de l'Europe. Les emballages consignés permettent de se protéger des pénuries sur certains modèles, car une fois un contenant importé, on peut l’utiliser 25 fois… donc on l’importe 24 fois moins. Enfin, l’argent dépensé ne quitte pas le pays vers des verriers étrangers, et alimente ainsi le tissu économique local en créant de l’activité et de l’emploi. Le pot en verre réutilisé devient ainsi un produit « local ».

Et l’argument écologique ?

Laurent Halmès fondateur de Bring Back
Laurent Halmès, fondateur de Bring Back.

Les processus de production et de recyclage du verre consomment énormément d’énergie ! Pour recycler un contenant, il faut en effet faire fondre le verre à 1.500°C pendant 24 heures. Chez nous, le lavage dure 20 minutes à 80°C. Une étude de l’ADEME, l’Agence de l’environnement française, a chiffré les émissions de CO2 évitées à 79% si on compte la mise à disposition dans des casiers adaptés, qui évite le carton jetable. Le verre consigné est donc cinq fois plus écologique. Qui plus est, comme les emballages en verre neufs proviennent de l’étranger, ils induisent plus de transport, avec l’utilisation des routes, la pollution et la congestion que cela engendre. La consigne, c’est le circuit court de l’emballage !

Et pourtant, vous n’avez rien inventé : les bouteilles consignées, on connaît ça, en Belgique…

Oui en effet, mais c’est réservé aux très grands groupes qui en ont les moyens, car il s’agit de gros investissements en espace, en main d'œuvre, en achat de machines, en stations d'épuration, etc. Notre innovation est de proposer ce lavage en tant que service externe, sans tracas, à tous ceux qui ne peuvent laver en interne, et donner ainsi accès au verre consigné aux petits et moyens industriels. À chacun son métier ! Et l’usage de la consigne ne s’arrête pas aux simples bouteilles et contenants de produits liquides. Nous permettons également d’étendre ce système aux bocaux alimentaires.

Est-ce simple, pour un producteur, de passer au verre consigné ?

Il faut mettre en place une logistique appropriée, ça ne se fait donc pas du jour au lendemain. Le défi, c’est de valider en amont le passage au verre consigné avec tous les maillons de la chaîne de valeur : clients, grossistes, etc. Il faut mettre tout le monde autour de la table. Nous avons un partenariat très étroit avec nos clients et nous sommes beaucoup plus interconnectés que dans l’économie linéaire.

Qui sont vos clients ?

Nous lavons pour des petits et moyens industriels des secteurs de la bière, du vin, du jus, du kombucha, mais également de certains produits alimentaires comme des tartinades, des confitures, du miel, etc. Les bocaux alimentaires consignés ont de l'avenir, car ils apportent de nombreux changements positifs à la filière alimentaire. Notre objectif est de promouvoir leur consigne un maximum et d’en faire une habitude commerciale et sociétale, comme en Allemagne. Les utilisateurs pionniers sont les clients de la filière bio. Les plus grands groupes sont encore frileux, car ils craignent de perdre leur clientèle, qui n’est pas habituée à devoir rapporter les vidanges. C’est le défi de Bring Back de convaincre ces plus grosses enseignes des avantages économiques et écologiques des bocaux en verre consigné ! 

En quoi les financements de la Région wallonne vous ont-ils été utiles ?

Nous avons pu investir dans la R&D pour de l’analyse et la conception de nouveaux services, ainsi que le développement de nouveaux emballages (bouteilles et bocaux). Nous avons également agrandi notre équipe afin de faire face à la croissance de notre activité.

 

Bring Back propose également des consignes pour les bocaux alimentaires
Bring Back propose également des consignes pour les bocaux alimentaires.

 

Quels sont les prochains défis auxquels vous êtes confrontés à votre stade de développement ?

Nous mettons actuellement sur pied une logistique de retour depuis les magasins bio en Wallonie qui s’étendra dans toute la Belgique pour le début 2023. Nous collaborons avec des grossistes partenaires pour reprendre les consignes directement chez eux, afin que les producteurs n’aient pas à traiter avec les bouteilles sales. Ces derniers n’auront ainsi plus besoin d’espace de stockage pour leurs vidanges. C’est important de lever cet obstacle, qui provoque des réticences.

Êtes-vous optimiste concernant l’avenir des emballages consignés ?

Si on veut atteindre la neutralité carbone en 2050, il est nécessaire de travailler sur cette question. Les volumes des emballages jetables qui peuvent être remplacés par des emballages réutilisables sont colossaux. D’énormes progrès verront le jour durant ces dix prochaines années et l’État a un grand rôle à jouer, que cela soit par l’utilisation de subsides et autres mécanismes de fiscalité positive, ou via la taxation des secteurs polluants. Le changement de mentalité va s’accélérer avec l’augmentation des prix du verre neuf et de l’énergie, mais aussi en raison des pénuries liées à la guerre en Ukraine. D’ailleurs, nous recevons de plus en plus de demandes…

 

Jusque début janvier, Circular Wallonia vous présente chaque semaine des entrepreneur.e.s qui ont franchi le cap de la circularité. Vous aussi, faites perdurez votre entreprise ! Choisissez l’économie circulaire et réduisez votre consommation en énergie et en matières premières. Faites-vous soutenir dans votre transition circulaire !

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