« Nos fours permettent de valoriser des déchets en nouvelles ressources », Marianne Noël, Sales Manager chez John Cockerill

Fort de ses 200 ans d’existence, le Groupe d’ingénierie John Cockerill propose des solutions dans de nombreux secteurs industriels sous forme d’équipements et de services. Il est présent aujourd’hui dans l’économie circulaire, grâce à sa technologie unique de fours NESA® à soles (étages) multiples conçus pour la pyrolyse. La pyrolyse consiste à chauffer une matière à très haute température sans oxygène.

Marianne Noël, Sales Manager chez John Cockerill

Qu’est-ce que vos « fours à soles multiples » ont de plus que les autres technologies de pyrolyse, en particulier en termes d'économie circulaire ?

Technologie unique de fours NESA® à soles (étages) multiples conçus pour la pyrolyse.
Les fours NESA® à soles (étages) multiples présentent de nombreuses applications circulaires.

Le four à soles multiples permet spécifiquement de contrôler avec une grande précision le temps de séjour des matières dans le four, le profil de température et la composition des gaz sur chaque sole (c.-à-d. chaque niveau) du four. Il permet donc de réduire les pertes d’énergie. C’est un énorme atout de ce type de four en comparaison avec d’autres types de fours plus classiques comme les « kilns » (fours rotatifs). Ceux-ci ne permettent ni une bonne gestion des échanges thermiques, ni un contrôle précis du profil de température, ni, le cas échéant, une maîtrise de la qualité finale du produit fini (par exemple le charbon actif). Nos fours à soles multiples peuvent fournir toute une série d’applications en phase avec les besoins sociétaux actuels, en produisant de nouvelles ressources à partir de déchets et évitant ainsi l’exploitation de nouvelles matières premières.

Est-ce une innovation récente ?

Cette technologie a plus de 100 ans ! Elle était utilisée, au départ, pour traiter différents types de minerais, ainsi que pour l’activation du charbon… puis sa réactivation, depuis une trentaine d’années. La réactivation consiste à désintégrer (autour de 850 à 900°C) les impuretés qui obstruent les pores très fins du charbon actif. Celui-ci retrouve ainsi ses propriétés initiales et peut être réutilisé pour filtrer des gaz, de l’air, de l’eau potable ou des liquides.

Régénérer du charbon actif, c’était déjà de l’économie circulaire avant l’heure…

Absolument ! Une filière de logistique inverse de filtres au charbon actif s’est développée en Belgique avec deux de nos clients, les leaders mondiaux, Chemviron en Wallonie et Desotec en Flandre. Quand les filtres sont saturés, ils viennent les rechercher dans toute l’Europe. Le charbon actif usagé de ces filtres est alors récupéré sous forme de déchets industriels puis il est traité en Belgique avec nos fours NESA à la chaleur et à la vapeur. Il est ensuite refourni vierge à leurs clients. Cela permet d’éviter de refabriquer du charbon actif à partir de charbon minéral. On peut le régénérer jusqu’à dix fois, ce qui représente cinq fois moins d’énergie que l’activation du charbon vierge. Comme les besoins industriels en filtration d’effluents liquides ou gazeux sont exponentiels, c’est très positif pour l’environnement.

Ces fours ont-ils développé des applications supplémentaires par la suite ?

Nos fours à soles multiples ont évolué au fil du temps avec de nouvelles applications comme le recyclage des déchets électroniques. Ils éliminent par pyrolyse une bonne partie des matières volatiles des déchets, comme les résines et le PVC. Ce procédé permet de séparer et de récupérer jusqu’à 98 % des métaux (or, platine, argent, cuivre, palladium, etc.) tout en minimisant les émissions nocives traditionnellement associées à leur récupération.

Notre première installation industrielle se situe depuis 2008 dans l’usine d’Igneo à Isbergues, dans le Nord de la France. Et nous venons de leur vendre une installation cinq fois plus grande aux Etats-Unis, qui devrait être opérationnelle en 2024 ! Les perspectives de ce nouveau marché sont gigantesques.

Quelles sont les autres applications intéressantes de la pyrolyse ?

Parmi ses applications, il y a la carbonisation (production de charbon de bois ou « biochar ») ou la torréfaction (comme pour le café – c’est une mini-pyrolyse), selon la température du procédé. L’idée est d’éliminer l’humidité et une partie des matières volatiles, comme les goudrons, afin d’augmenter le pouvoir calorifique des matières pour en faire du combustible. Cela permet à la fois de diminuer les émissions de CO2 par unité de puissance électrique produite et d’utiliser une source renouvelable d’énergie, le biochar, comme substitut au charbon.

Marianne Noël, Sales Manager chez John Cockerill
Marianne Noël, Sales Manager chez John Cockerill.

Quelles sont ces matières que vous « brûlez » dans vos fours pour obtenir ces combustibles ?

Nos fours permettent de valoriser des déchets ménagers et des déchets de biomasse : bois traités ou non (par exemple, les déchets de meubles IKEA…), sciure, rafles de fruits et autres déchets agricoles (ou déchets forestiers tels que racines ou écorces, sciure de bois sous forme de granulés, etc.). Les produits issus de ces procédés ont beaucoup de débouchés industriels : biochar en cimenterie ou sidérurgie, biomasse torréfiée dans les centrales électriques, par exemple. Nous pouvons même produire de l’hydrogène après gazéification de ces combustibles. En somme, nos fours permettent de valoriser des déchets en nouvelles ressources pour de multiples usages.

Mais comment justifiez-vous un bilan énergétique positif si vous traitez ou « brûlez » des matières à très haute température ?

Dans la plupart des applications de pyrolyse, il ne faut un apport d’énergie que pour la première chauffe du four, qui dure quelques heures. Mais une fois que le processus est lancé, il s’auto-alimente avec les composés volatils extraits de la matière première et consomme une petite partie du carbone fixe restant pour entretenir la réaction et la maintenir à haute température. Nos fours fonctionnent en continu un minimum de 8 000 heures/an sans consommer d’énergie fossile. Bref, ils créent plus de ressources qu’ils n’en consomment.

 

Jusque début janvier, Circular Wallonia vous présente chaque semaine des entrepreneur.e.s qui ont franchi le cap de la circularité. Vous aussi, faites perdurez votre entreprise ! Choisissez l’économie circulaire et réduisez votre consommation en énergie et en matières premières. Faites-vous soutenir dans votre transition circulaire !

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